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Fin d'une «concertation» sur la ligne nouvelle Montpellier-Perpignan
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15 janvier 2021 |
Aujourd'hui se terminait une «concertation» compliquée sur la LNMP, projet sur lequel SNCF-Réseau s'obstine à refuser le fret et tout embranchement entre Béziers et Perpignan: le point sur la question de Narbonne
Une «concertation publique» était annoncée par SNCF-Réseau sur le projet de Ligne nouvelle Montpellier-Perpignan (LNMP), entre le 2 novembre 2020 et le 15 janvier 2021, sur le site https://www.ligne-montpellier-perpignan.com.
La réticence habituelle de SNCF Réseau à mettre en cause ses
choix faits il y a plus de 10 ans est une difficulté évidente de
ce type de concertation, rendue encore plus difficile par
l'épidémie du Covid qui a annulé les rencontres prévues, au profit
toutefois de quelques rencontres par vidéo, qui n'ont pas vraiment
permis aux citoyens et associations de faire entendre leur voix.
Plusieurs associations et fédérations ont déposé des
contributions à cette occasion:
- Contribution de FNE-LR (France Nature Environnement - Languedoc-Roussillon), qui indique:
- que l'évaluation de l'impact environnemental du tronçon Montpellier-Béziers est insuffisant
- que l'utilité (et donc la réalisation) de ce tronçon ne peut
être analysée que dès lors que la conception du tronçon
Béziers-Perpignan aura été finalisée
- qu'il est indispensable que toute la ligne soit mixte TGV-fret, avec un tunnel sous les Corbières, et des raccordements vers les gares centrales
- Contribution d'ASSECO (section «consommateurs» de la CFDT) d'Occitanie, qui indique:
- que la mixité intégrale TGV-fret est primordiale
- que si un raccordement à l'ouest de Narbonne était réellement irréalisable, l'unique alternative valable serait une gare à Nissan-lez-Ensérune, entre Béziers et Narbonne, avec correspondances ferroviaires complètes, à environ 6 mn de train de Béziers et de Narbonne
- que le développement du fret sur l'axe littoral est une priorité au vu des conséquences de la circulation des camions sur la pollution atmosphérique, l'effet de serre, et l'usure importante que provoquent les camions sur les routes
- Contribution de No Pasarán, qui revient en détail sur les promesses et affirmations de SNCF-Réseau, et notamment sur le débat de 2009 sur la LNMP, et indique:
- qu'en 2009, les débats concluaient à une ligne mixte TGV-fret et en aucun cas sur une ligne 100% TGV conçue pour 350 km/h
- que la fragilité de la ligne des étangs face à la submersion marine (nombreuses photos marquantes et très convaincantes) exige de disposer d'une alternative pour le fret
- que la traversée des centres-villes par la totalité du fret n'est pas acceptable
- que les gares TGV excentrées ne sont pas souhaitables, notamment à Béziers ou une gare sans correspondance est envisagée. L'hypothèse d'une gare intermédiaire entre Béziers et Narbonne doit par contre être envisagée.
- Contribution des Verts (EELV Occitanie, commission Transports et mobilités):
- pour une ligne mixte TGV-fret sur tout le tracé
- sans gares TGV excentrées et avec un raccordement à l'ouest de Narbonne
- pour construire un tunnel sous les Corbières, et limiter la pente de la voie pour faciliter la circulation du fret. L'exemple du tunnel du Perthus (ligne Perpignan-Figueras) montre que le coût peut être encadré.
- contre le choix arbitraire, par SNCF Réseau, d'une ligne TGV
«très haute vitesse» (apte à 350 km/h), ce qui complique
inévitablement les raccordements et l'insertion du tracé.
Rappelons que la LNMP est un projet qui doit parachever l'axe
ferroviaire TGV-fret qui existe déjà de Nîmes à Barcelone (avec
des prolongements TGV vers Madrid et toute l'Espagne, une
connexion fret au port de Barcelone, et une future prolongation
TGV et fret sur l'axe méditerranéen en directation de Valencia), à
l'exception du tronçon Montpellier-Barcelone. Ce projet est
stratégique pour l'Europe, listé au «Réseau Trans-Européen -
Transports» (TEN-T, selon le sigle anglais) de l'Union Européenne
et à ce titre susceptible de bénéficier de subventions. Le projet
est également stratégique pour la France, pour réduire le goulet
d'étranglement entre Montpellier et Narbonne, ainsi que sécuriser
l'axe ferroviaire Béziers-Perpignan, qui passe au ras des étangs,
est régulièrement inondé ou même effondré comme le 23
octobre 2019 (la réouverture complète n'a eu lieu que le 25
novembre 2019).
Il est donc donc essentiel que:
- l'axe soit intégralement utilisable par les TGV et les trains de fret, comme le reste de l'axe Nîmes-Barcelone,
- qu'il y ait des points d'échange entre les deux lignes, pour permettre la circulation des trains et notamment du fret en cas d'incident,
- et bien sûr, que les gares centrales soient correctement desservies, pour que les voyageurs ne perdent pas du temps à l'occasion de la construction d'une LGV, ce qui n'est évidemment pas acceptable.
Or le projet présenté au public n'a pas évolué par rapport aux
projets envisagés il y a plus de 10 ans, et malgré les demandes de
la Région Occitanie et d'autres intervenants.
L'argumentation de SNCF Réseau repose sur l'impossibilité de
connecter la gare centrale de Narbonne à la LNMP en directement de
Perpignan, au motif du relief (le massif des Corbières), en
particulier si le tronçon Narbonne-Perpignan est accessible au
fret et donc construit avec de faibles pentes, ce qui imposerait
un tunnel et donc la réalisation d'un embranchement ferroviaire en
tunnel. Le schéma ci-dessous illustre cette question:
Schéma du secteur de Narbonne, illustrant:
- les voies existantes (en bleu),
- le projet LNMP (en rouge),
- l'embranchement voyageurs entre la LNMP et la ligne de Toulouse (orange),
- l'absence d'embranchement vers la LNMP en direction de Perpignan (vert).
La gare TGV Narbonne-Ouest est prévue dans le cercle vert, au croisement de la LNMP avec la ligne de Toulouse
(Réalisation propre, vue 3D issue de Google Earth)
Dans ces conditions, le projet de la LNMP perd la plus grande
partie de sa pertinence, étant donné que:
- les villes principales (Béziers et Narbonne) sont mal desservies, avec des gares excentrées, sans aucune correspondance ferroviaire dans le cas de Béziers, et avec des correspondances peu fréquentes dans le cas de Narbonne
- le refus de la mixité fret entre Béziers et Perpignan annule le but principal du projet, et rend sans doute illusoires les subventions européennes espérées
- le refus de la mixité fret entre Béziers et l'embranchement vers Toulouse (pourtant estimé au coût, raisonnable, de 70 à 170 M€), au motif que le fret va principalement en directement de l'Espagne, interdit à tout jamais le développement du fret dans le sud de la France
- le refus de tout raccordement entre la LNMP et la voie classique littorale, sans aucun embranchement entre Béziers-est et Perpignan, supprime toute redondance sur ce qu'on ne peut plus appeler un «doublet de lignes». Si une ligne est bloquée, l'autre ne pourra pas la dépanner.
- la totalité du fret en direction de Perpignan et de l'Espagne devrait traverser les gares centrales de Béziers et de Narbonne, handicapant le développement d'autres trafics ferroviaires
- alors que la submersion de la ligne des étangs n'est
qu'une question de décennies et que les inondations
occasionnelles vont devenir de plus en plus fréquentes, le
projet ne prévoit aucune alternative, au point qu'il sera un
jour obligatoire de construire une 3e ligne ferroviaire,
pour remplacer la ligne actuelle qui ne sera plus
utilisable: la stratégie choisie est donc le résultat d'un
aveuglement total.
L'argument technique repose en réalité sur le fait que le
tracé a été conçu dès le départ dans une optique «100% TGV»,
avec des gares TGV excentrées et sans utilisation par le fret.
Ce qui aboutit, de façon logique, à un tracé qui ne permet pas
facilement la création des embranchements indispensables pour
permettre la mixité TGV-fret de la ligne et la desserte des
gares centrales par les TGV (dont il faut rappeler que, de
l'avis même de la SNCF, elles ne sont nullement saturées et
peuvent facilement les accueillir).
Il est clair que la mixité TGV-fret intégrale et la desserte
des gares centrales par les TGV sont des exigences
primordiales, faute de quoi le projet perdrait toute sa
pertinence. C'est à partir de ce postulat que le projet doit
être réétudié, par exemple:
- en réalisant le raccordement vers Perpignan même s'il est coûteux, vu son utilité considérable et son rôle hautement stratégique
- en modifiant le tracé pour rendre le raccordement plus facilement réalisable, quitte à réduire la vitesse des trains, à cause soit d'un rayon de courbure un peu serré pour un TGV (l'impact serait mineur), soit d'une pente un peu forte pour un train de fret lourd (impact à évaluer)
- en choisissant un tracé radicalement différent, par exemple par le sud de Narbonne. Cette option semble toutefois complexe.
- en dernier recours, en aménageant un embranchement
ferroviaire, voyageurs + fret, entre Béziers et Narbonne (à
Nissan-lez-Ensérune), où serait construite une gare TGV en
correspondance avec les TER fréquents de l'axe littoral ou
avec des navettes spéciales. Ce choix crée une rupture de
charge regrettable, mais les temps de trajets ne sont que de
quelques minutes et le temps perdu peut donc être limité à
condition que les correspondances soit gérées efficacement.
Le président du CESER pour la mixité de la LNMP
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10 mars 2021 |
Le lobby Eurosud-Team (pour les grands projets ferroviaires), qui est dirigé par le président du CESER Occitanie, se prononce clairement pour la mixité intégrale de la LNMP.
...Et des projets à Narbonne pour rendre techniquement possible cette mixité
L'info précédente sur la «concertation» sur la LNMP, a omis de signaler une contribution de poids: celle du lobby Eurosud-Team, qui regroupe tous les acteurs intéressés par les grands travaux ferroviaires dans la région (le Conseil Régional, des collectivités territoriales, des entreprises du BTP, plusieurs CCI, SNCF Réseau et SNCF Voyageurs, des banques, ou encore le port de Barcelone). Il se trouve que Eurosud-Team est dirigé par le président du CESER (Conseil économique, social et environnemental régional) de l'Occitanie, Jean-Louis Chauzy.
Cette contribution (ici sur le site d'origine, ou là
en copie locale) est intéressante. Pas tellement sur
l'aspect, très attendu, qui regrette le retard pris par le projet,
et qui se réjouit que celui-ci ne soit finalement pas enterré,
mais sur d'autres points.
Un premier argument concerne le phasage en deux segments (phase
1: Montpellier-Béziers, puis phase 2: Béziers-Perpignan), jugé non
pertinent et finalement coûteux: il faudrait en effet financer la
phase 1, alors que les bénéfices attendus par la réalisation
complète (qui raccorderait enfin la voie nouvelle espagnole
Madrid-Perpignan à la voie nouvelle française Nîmes-Montpellier)
ne seraient que très partiellement obtenus. D'autre part, si
l'Europe doit pouvoir co-financer un tel raccordement
international, qu'en est-il si la France se limite à un tronçon
Montpellier-Béziers?
Le second argument rejoint ce qui est exprimé ici depuis
longtemps: il est indispensable que la LNMP soit intégralement
accessible aux trains de marchandises, c'est-à-dire qu'il y a une
mixité TGV-fret intégrale, alors que SNCF Réseau et l'État
s'obstinent à vouloir limiter cette mixité au tronçon
Montpellier-Béziers, en excluant à la fois le tronçon
Béziers-Perpignan et l'embranchement de Narbonne entre la LNMP
(depuis Montpellier) et la voie classique (vers Toulouse).
Eurosud-Team insiste sur la fragilité de la ligne existante face
au risque de submersion marine, risque bien réel comme l'a
démontré la fermeture de la ligne au sud de Béziers pendant un
mois en octobre 2019, et devant se répéter de plus en plus souvent
à cause du changement climatique qui provoque une multiplication
des phénomènes météorologiques extrêmes ainsi qu'une hausse du
niveau de la mer (or plusieurs parties de la voie classique
passent littéralement au ras de l'eau).
L'embranchement de Narbonne Ouest: vers une solution?
La difficulté technique invoquée par SNCF Réseau pour bloquer la
mixité TGV-fret pourtant indispensable, c'est d'une part la
nécessité d'un tunnel sous la massif des Corbières, permettant de
limiter la pente à un niveau acceptable pour des trains de fret
lourds circulant à bonne vitesse (et permettant en outre de
limiter grandement les impacts environnementaux).
Mais c'est également, d'autre part, la difficulté du raccordement
entre la voie classique à l'ouest de Narbonne et la LNMP vers
Perpignan. Invoquer une telle difficulté est grave, car cela
revient à interdire toute bifurcation entre la LNMP et la voie
classique entre Béziers et Perpignan: le «doublet de lignes» si
souvent invoqué deviendrait deux lignes hermétiques, donc aucune
ne pourrait secourir l'autre en cas d'incident.
Au cœur du problème, le relief à l'ouest de Narbonne, dès que
l'on va vers le sud. SNCF Réseau indique que la LNMP, pour être
compatible avec le fret, devrait passer en tunnel, et qu'il serait
dès lors très difficile, coûteux, et peu souhaitable, de créer un
embranchement en plein tunnel.
Mais il y a d'autres possibilités: comme le montre le schéma
ci-dessous, il suffirait de quelques embranchements, hors zone à
fort relief, pour raccorder la LNMP à la ligne classique à l'ouest
de Narbonne: un sens de circulation se raccorderait directement au
niveau de l'intersection avec la ligne Narbonne-Toulouse, tandis
que l'autre sens se raccorderait en faisant une boucle via
l'embranchement déjà prévu entre la LNMP (Perpignan) et la voie
vers Toulouse.
Schéma de principe d'une proposition de raccordement à l'ouest
de Narbonne
Car plus encore que le tunnel sous les Corbières, c'est peut-être
bien à l'ouest de Narbonne que se situe la clé d'une LNMP
réellement utile, sécurisante pour la pérennité du fret, et
permettant de fiabilité le réseau en cas d'incident grâce à un
véritable «doublet de lignes».
L'État refuse de faire le bilan de la ligne Perpignan-Figueras
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27 mars 2021 |
L'État persiste à refuser de dresser le bilan après 5 ans, exigé par la loi et ordonné par le Tribunal administratif de Paris, de la ligne TGV-fret Perpignan-Figueras. Raison invoquée: pour l'instant ça ne marche pas bien donc le bilan ne «répondrait pas à l'esprit» de la loi
En France, les grands projets de transport financés avec de l'argent public doivent faire l'objet d'un bilan dans les 5 ans après leur réalisation. Il s'agit du «bilan LOTI», du nom de la «Loi d'Orientation sur les Transports Intérieurs» (loi n°82-1153 du 30 décembre 1982) qui contenait initialement cette règle désormais codifiée à l'article L1511-6 du Code des transports:
Lorsque les opérations mentionnées à l'article L. 1511-2 [NdlR: les grands projets et choix de transports] sont réalisées avec le concours de financements publics, un bilan des résultats économiques et sociaux est établi au plus tard cinq ans après leur mise en service. Ce bilan est rendu public.
À l'évidence, il serait utile de lire ce rapport, sachant qu'il
est aujourd'hui question de lancer le tronçon
Montpellier-Perpignan, et qu'il y a d'autres projets plus ou moins
apparentés, comme la liaison TGV du Pays Basque, ou encore les
tunnels pour la ligne Lyon-Turin.
Cette question a également été posée à l'Assemblée par une députée, Mme Florence Lasserre (MoDem, Pyrénées-Atlantiques), dans une question écrite publiée le 25 décembre 2018.Article 1er: La décision du 9 août 2016 par laquelle le ministre chargé des transports a refusé d'établir et de rendre public avant 2018 le bilan des résultats économiques et sociaux de la section ferroviaire internationale Perpignan-Figueras est annulée.
Article 2 : Il est enjoint à la ministre de la transition écologique et solidaire de procéder à la réalisation et à la publication du bilan des résultats économiques et sociaux de la section ferroviaire internationale Perpignan-Figueras dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent jugement.
La réponse du gouvernement n'est arrivée que le 27 octobre 2020, donc bien après le jugement du TA de Paris lui ordonnant de produire ce bilan des 5 ans: vu que le concessionnaire, TP Ferro (filiale de ACS-Dragados et d'Eiffage) a fait faillite (largement à cause du trafic beaucoup plus faible qu'attendu) et que l'Espagne et la France ont récupéré le projet, la ligne ne marche pas bien, et donc ce n'est pas le moment de faire un bilan.
Après la mise en service complète de la section internationale Perpignan-Figueras en janvier 2013, la société concessionnaire a rencontré de réelles difficultés financières. Les manquements contractuels du titulaire du contrat de concession ont ainsi conduit le Royaume d'Espagne et la République française à prononcer la déchéance de ce contrat le 20 décembre 2016. Afin de garantir la continuité des services ferroviaires, le Royaume d'Espagne et la République française ont confié, par une convention d'exploitation, les biens de la concession, ainsi que l'exploitation, la maintenance et le renouvellement de la section internationale à une filiale commune aux deux gestionnaires d'infrastructures nationaux, ADIF et SNCF Réseau, le 21 décembre 2016, date d'entrée en vigueur de la déchéance du contrat de concession. Cette instabilité depuis la mise en service n'a pas permis à la ligne de fonctionner dans des conditions normales d'exploitation. Le fonctionnement actuel n'est d'ailleurs que transitoire.
Dans ces conditions, réaliser le bilan LOTI ne répondrait pas à l'esprit de l'article L. 1511-6 du code des transports.
Ceci nous rappelle les travers de la France en matière de grands
projets d'infrastructures:
- le refus de reconnaître les échecs
- l'incapacité à en tirer des leçons pour que les projets suivants ne reproduisent pas les mêmes échecs
- l'incapacité à dresser un bilan sincère des opérations passées
avant de figer les opérations futures
Car si l'opérateur a fait faillite, notamment à cause du faible trafic et de l'ouverture tardive à la circulation du côté français, ces faits devraient être exposés et analysés. Et vraiment, on ne comprend pas pourquoi l'État ne peut pas indiquer pourquoi le trafic est si faible, ou pourquoi il pense que cette situation n'est qu'une situation temporaire qui dure depuis 10 ans.
Ou alors c'est que l'État veut d'abord lancer le futur échec annoncé: une LNMP (ligne nouvelle Montpellier-Perpignan) non mixte, et donc un trafic fret France-Espagne bloqué pendant plusieurs semaines après les épisodes de submersion marine sur la ligne des étangs, et de nouvelles gares TGV absurdes, l'une à Béziers (sans correspondance ferroviaire), l'autre à Narbonne (inaccessible aux trains Montpellier-Toulouse).Inondations entre Nîmes et Lunel: nouvelle illustration de la nécessité de la mixité fret-TGV sur Montpellier-Perpignan
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17 septembre 2021 |
Les fortes précipitations de septembre 2021 ont à nouveau coupé la voie ferrée. Le fret continue à passer, grâce au CNM. Il faut que la future ligne Montpellier-Perpignan offre la même flexibilité, et que la LGV soient bien connectée aux gares centrales, pour offrir aux voyageurs les alternatives les plus pratiques.
La météo du 14 septembre 2021
Ce jour-là, des précipitations exceptionnelles s'abattent dans le
Gard, entre Lunel et Nîmes, avec des cumuls dépassant localement
250 mm en 3 heures, notamment dans le secteur de Vergèze et de
Bernis. Un évènement exceptionnel comme il en arrive de temps en
temps entre Montpellier, Nîmes et Alès, et qui est voué à devenir
de plus en plus fréquent, et surtout de plus en plus puissant, à
cause du réchauffement climatique et de l'augmentation de la
température de la mer en fin d'été.
Pluviométrie calculée par Météo-France, le matin du 14
septembre 2021 (Source: Météo France)
Cliquez sur l'image pour l'afficher en grand
L'ouest de Nîmes sous l'eau
Les conséquences ont été impressionnantes: torrents d'eau dans le
centre de plusieurs villages (Vergèze, Codognan, Uchaud, Bernis),
ainsi que dans certains quartiers de Nîmes; routes totalement
bloquées, ainsi que l'autoroute A9, piégeant des centaines de
voitures et de camions; véhicules de toutes tailles dans les
fossés (jusqu'à des camions de pompiers et des camions-grues de
grande taille); des dégâts matériels considérables; des personnes
évacuées par hélitreuillage...
Route inondée à côté du ruisseau le Razil, près de l'usine de pesticides Syngenta à Aigues-Vives Source: France 3 Occitanie |
Autoroute A9 entre Nîmes et Lunel Source: Actu.fr Occitanie |
La voie ferrée inondée et abîmée
Sur le plan ferroviaire, la voie ferrée a été coupée par prudence entre Montpellier et Nîmes, et elle a subi de lourds dégâts entre Lunel et Nîmes. Des passagers ont été bloqués pendant 10 heures dans la gare de Vergèze, ne pouvant être évacués ni par le train, ni par les routes qui étaient également inondées. L'eau coulait à flot au rez-de-chaussée de la gare de Nîmes mais cela est assez habituel (la voie ferrée passe au-dessus du viaduc). La circulation des trains a repris dès le lendemain matin entre Montpellier et Lunel, mais pas entre Lunel et Nîmes, où le retour progressif à la normale n'est prévu que pour le 28 septembre 2021.
Par endroits, le ballast a été emporté par l'eau au point que
les traverses sont dans le vide, suspendues aux rails. Ailleurs,
les dégâts sont moins impressionnants, mais l'eau ayant inondé les
voies pendant des heures sur de grandes distances, on comprend que
la voie doit être très abîmée.
Ballast emporté par l'eau entre Nîmes et Lunel le 14/09/2021 Source: Vià Occitanie / Tweeter |
Voie ferrée inondée entre Nîmes et Lunel le 14/09/2021 Source: SNCF TER LiO Occitanie / Tweeter |
Débris sur la voie ferrée entre Nîmes et Lunel le 14/09/2021 Source: SNCF TER LiO Occitanie / Tweeter |
Voie ferrée inondée entre Nîmes et Lunel le 14/09/2021 Source: SNCF TER LiO Occitanie / Tweeter |
Le fret continue à passer dans le Gard – il faut qu'il en soit
de même entre Béziers et Perpignan
Grâce au Contournement ferroviaire de Nîmes et Montpellier (CNM),
dont il faut rappeler qu'il avait été conçu essentiellement pour
le fret et sans l'ajout de gares TGV, le fret ferroviaire n'a
jamais été interrompu, même au plus fort des inondations. En
effet, le CNM a été construit pour être hors d'eau, au prix
d'énormes travaux de terrassement. Voici donc l'itinéraire
emprunté par les trains de marchandises, conforme au but initial
du CNM et à la déclaration d'utilité publique de 2005:
Itinéraire du fret via le CNM et ses raccordements dédiés, même au plus fort des inondations
Rappelons que la présence des gares TGV sur le CNM n'a aucune
utilité pour les trains de marchandises, puisqu'elles n'ont pas de
service fret.
Les trains de fret passent sous la gare de Montpellier-la Mogère
(dite Sud-de-France), et à l'extérieur de la gare de Nîmes-Manduel
(dite Pont-du-Gard).
Ceci illustre une nouvelle fois l'absolue nécessité, également
sur la ligne nouvelle Montpellier-Perpignan (LNMP), que la ligne
soit entièrement utilisable par le fret ferroviaire, car le
tronçon entre Béziers et Perpignan est particulièrement exposé
aux inondations, comme cela s'est déjà produit récemment.
TGV et Intercités: ça passe, mais avec des changements de gare
Depuis le 15 septembre 2021, l'ensemble des TGV et des Intercités
sont également déviés par le CNM. Ils ne desservent donc pas les
gares centrales, mais uniquement les gares excentrées de
Montpellier-la Mogère et de Nîmes-Manduel.
Cette situation, qui est appréciable pour les voyageurs
traversant notre région, et plus pénalisante pour les voyageurs
locaux, surtout à Montpellier où des transferts sont nécessaires
entre les deux gares: si l'aiguillage de St-Brès était construit
(rappelons que c'est toujours possible), ces trains pourraient
parfaitement desservir Montpellier-centre.
Une situation compliquée pour les TER en l'absence d'aiguillage
à St-Brès
Les TER fonctionnent à l'ouest de Lunel et à l'est de Nîmes, mais
ils sont interrompus entre Lunel et Nîmes, ainsi que sur la petite
ligne Nîmes-Le Grau du Roi. Des bus de substitutions sont en
service entre Lunel et Nîmes, dont certains desservent également
Vergèze, mais leur temps de trajet est très long par rapport au
train (40 mn pour le bus direct, 50 mn pour celui desservant
Vergèze, contre 15 mn en train), et la synchronisation est loin
d'être parfaite.
LiO TER Occitanie a annoncé le 17 septembre que quelques TER (il
est question de 3 trains par jour) seraient mis en service via le
CNM, entre Sète, Montpellier, et Nîmes-centre, voici donc leur
itinéraire.
Itinéraire de TER spéciaux entre Sète et Nîmes-centre via la gare excentrée de Montpellier-la Mogère
Cette solution, qui peut dépanner une partie des usagers, n'est
évidemment pas parfaite, déjà parce que ces trains ne desservent
pas grand chose: ni Montpellier-centre (mais uniquement la gare
excentrée, bien moins pratique), ni Baillargues et Lunel, ni même
la gare excentrée de Nîmes-Manduel puisque l'embranchement, conçu
pour le fret, se situe à l'extérieur de la gare.
Là encore, une meilleure solution serait possible si
l'embranchement de St-Brès était là: ces TER spéciaux pourraient
desservir Montpellier-centre et Baillargues avant de s'engager sur
le CNM.
Cela illustre une nouvelle fois la nécessité que, si on
construit deux voies ferrées parallèles, elles soient
correctement interconnectées pour que chacune puisse être une
solution de secours pour l'autre. Un argument inaudible si on ne
regarde que la rentabilité en situation normale. On y comprend,
à nouveau, l'absurdité du projet actuel de la LNMP, qui ne
prévoit absolument aucune interconnexion entre la ligne actuelle
et la nouvelle ligne, depuis l'est de Béziers jusqu'à l'ouest de
Narbonne où les lignes divergent enfin.
Mise à jour du 21/09/2021: les TER Montpellier-Nîmes
Les TER entre Nîmes-centre et Sète via Montpellier-la Mogère ont
bien commencé à circuler le lundi 20 septembre 2021.
Train TER |
n° 22451 |
n° 22455 | n° 22459 |
Nîmes-centre |
6h03 |
8h42 |
16h37 |
Nîmes-Manduel |
| |
| |
| |
Montpellier-Mogère |
6h45 / 6h47 |
9h26 / 9h29 |
17h19 / 17h32 arrêt 13mn |
Sète |
7h07 |
9h47 / 10h22 arrêt 35mn |
18h00 / 18h19 arrêt 19mn |
Montpellier-centre | 10h47 |
18h36 |
Horaires de Montpellier à Nîmes-centre (arrivée / départ)
Train TER |
n° 22452
|
n° 22456 | n° 22460 |
Montpellier-centre |
12h48 |
18h46 |
|
Sète |
7h19 |
13h05 / 13h20 arrêt 15mn |
19h03 / 19h22 arrêt 19mn |
Montpellier-Mogère |
7h37 / 7h41 |
13h38 / 13h41 |
19h40 / 19h43 |
Nîmes-Manduel |
| |
| |
| |
Nîmes-centre |
8h25 |
14h25 |
20h27 |
Ce TER atypique fonctionne en mode diesel, ce qui peut surprendre
vu que tout le parcours est électrifié et que la rame 81821/81822
(car chaque extrémité porte un numéro) est bi-mode, c'est-à-dire
qu'elle peut fonctionner à la fois à l'électricité et au diesel,
par exemple quand elle va au Grau-du-Roi via la petite ligne qui
n'est pas électrifiée.
Cette particularité s'explique aisément: cette rame fait partie
de la série B 81500, qui sont des
rames Bombadier de type AGC («autorail à grande capacité»), certes
bi-mode (électricité et diesel), mais mono-courant: elle ne
fonctionne qu'en 1.5 kV CC, la tension utilisée sur les voies
électrifiées du sud de la France. Elle ne fonctionne donc pas en
25 kV 50 Hz, la tension utilisée dans le nord de la France mais
également sur les LGV, et sur le CNM. Cette rame ne peut donc
circuler sur le CNM qu'avec son moteur diesel, et dans ces
conditions il est probablement plus simple ou plus sûr (pour
éviter de connecter au 25 kV les circuits conçus pour le 1.5 kV)
de la laisser en permanence en mode diesel.
Au final, les temps de parcours sont fort longs: bien sûr en cas
d'aller-et-retour à Sète avec un arrêt prolongé sur place, mais
également entre Montpellier-la Mogère et Nîmes-centre: 44 mn pour
un trajet sans arrêt, le TER en mode diesel est probablement loin
de rouler à 220 km/h, la vitesse maximale sur le CNM.
LNMP: multiples prises de position pour le fret sur Montpellier-Perpignan et les raccordements à l'ouest de Narbonne
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18 octobre 2021 |
De multiples mouvements, associations, élus locaux et collectivités, se prononcent pour la mixité intégrale de la ligne nouvelle Montpellier-Perpignan; le président de la SNCF ne leur donne pas tort.
Alors qu'on annonce un lancement «bientôt» de la 1ère
phase (Montpellier-Béziers) de la ligne nouvelle
Montpellier-Perpignan (LNMP), alors que cette 1ère phase pose peu
de problèmes (elle est mixte fret-TGV et dessert Béziers-centre),
les prises de position se multiplient pour que la 2e
phase soit corrigée. Car si le projet était validé en l'état, avec
un tronçon Béziers-Perpignan inaccessible au fret, avec des
guerres excentrées, et avec des embranchements déficients à
Narbonne, la force de la machine bureaucratique est telle que même
si la 2e phase ne devait être construite que dans 30
ans, il serait probablement impossible de modifier le projet d'ici
là.
Positions politiques
Positions des collectivités territoriales
- Montpellier (commune), le 21 septembre 2021: le conseil municipal a pris position pour la mixité intégrale fret-TGV et les raccordements à Narbonne
- Montpellier (Métropole), le 28 septembre 2021: le conseil de Métropole a défendu la même position que la ville de Montpellier. Cette position a été approuvée à l'unanimité, à part l'abstention de 2 élues: Alenka Doulain (qui est pourtant intervenue en séance pour se réjouir de cette position) et Clothilde Ollier (qu'il serait vain de chercher à comprendre).
- La Région Occitanie, article dans La Marseillaise du 6 octobre 2021, qui rapporte des propos très clairs de la présidente Carole Delga (PS):
des propos rapportés également dans Actu.fr Montpellier (Métropolitain) dans un article du 2 octobre 2021:Mais le calendrier [de la construction de la LNMP] fait peur. Les travaux du premier tronçon mixte (fret/voyageurs) Montpellier-Béziers à 300 km/h ne débuteraient qu’en 2029, pour une livraison en 2034. Pas terminé avant 2040, le tronçon Béziers-Perpignan envisagé sans fret ne convient pas à Michaël Delafosse, ni à Carole Delga. « La Région défend une mixité complète. Rien n’est arrêté, on va retravailler cela », promet l’élue socialiste. Même réserve au sujet d’éventuelles gares TGV nouvelles à Béziers et/ou Narbonne. À Béziers, la Région investit dans la gare historique via un pôle d’échanges multimodal. Quant à Narbonne. « Il faut voir si la gare centrale pourrait être raccordée à la nouvelle ligne », répond Carole Delga. À la SNCF, Jean-Pierre Farandou confirme que des études sont en cours.
« Le projet remonte à plusieurs années et en effet il n’y avait pas de mixité jusqu’à Perpignan. Aujourd’hui, rien n’est arrêté. Nous allons le retravailler. La Région Occitanie défend qu’il y ait une mixité complète jusqu’à Perpignan »
Positions des associations
- France Nature Environnement (FNE Languedoc-Roussillon), la
FNAUT (usagers des transports), la CRI LNMP (association qui
cherche depuis longtemps à améliorer la LNMP), et
ASSECO-CFDT (l'association de consommateurs de la CFDT),
le 4 juin 2021: conférence de presse
pour défendre la mixité intégrale de la LNMP et la
construction d'un tunnel sous le massif des Corbières (dans
Actu.fr Montpellier - Métropolitain).
Position du président de la SNCF
- La Pieuvre du Midi (journal de Béziers - Agde - Pézénas) du 15 octobre 2021 rapporte les propos suivants tenus par Jean-Pierre Farandou, président de la SNCF, lors d'une visite à Montpellier le 30 septembre 2021:
« il fallait revoir le projet de la LNMP pour permettre la circulation du Fret jusqu'à Perpignan »
« Quand on voit le mur de camions sur l'autoroute, on se dit que cela ne peut plus durer. Il faut une politique très volontariste de report de la route sur le rail, quitte à revoir les études. Le tracé de cette LGV remonte à il y a 10 ans... depuis, il s'est passé des choses. »
Bien sûr, la position d'une personne ne fait pas tout, aussi haut
placée soit-elle: on se souvient de Guillaume Pépy, alors
président du groupe SNCF, avait poursuivi sans rien faire la
construction de la gare de la Mogère alors qu'il savait que
c'était une absurdité. Mais c'est tout de même une prise de
position importante, surtout quand elle confirme celle de nombreux
acteurs locaux.
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